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Stratégie révolutionnaire

Pour une révolution contre le système technologique

Par
S.C
17
May
2022
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« Il est vain de déblatérer contre le capitalisme : ce n’est pas lui qui crée ce monde, c’est la machine. »   

– Jacques Ellul, La Technique ou l’Enjeu du siècle, 1954.

 Lors de mes échanges au sujet de la catastrophe environnementale en cours, on me demande régulièrement quelles « solutions » je propose. Dans cet usage précis du terme « solution », il ne signifie pas un « ensemble de décisions et d’actes qui peuvent résoudre une difficulté » (Le Robert), mais plutôt un « ensemble de décisions et d’actes soigneusement planifiés par les scientifiques, les techniciens et les gouvernements, capables de résoudre la crise socio-écologique sans prise de risque et de conserver le confort matériel moderne – Wi-Fi, Internet, smartphone, ordinateur, voiture, réfrigérateur, micro-onde, machine à laver, four, plaques de cuisson, bouilloire, chauffage, climatisation, eau courante, eau chaude, électricité, hôpital, transports à grande vitesse, supermarchés, cinéma, etc. »

 On ne solutionne rien en conservant l’essentiel des éléments constituant un problème. Il faut 3 000 tonnes de sable pour construire un bâtiment des dimensions d’un hôpital, 200 tonnes pour une maison individuelle et 30 000 tonnes pour un kilomètre d’autoroute[1]. En 2017, environ 44 milliards de tonnes de sable, gravier et argile ont été arrachées à la croûte terrestre, soit l’équivalent de plus de quatre millions de tours Eiffel[2]. Remplacer ce sable par un autre matériau ne fait que déplacer le problème et in fine, en crée d’autres. Conserver l’addiction au confort moderne reposant sur un extractivisme insensé et se soumettre aveuglément à l’autorité d’une bande d’incapables, ce n’est pas une solution ; c’est du suicide. La solution, c’est la Révolution. Non pas pour instaurer un énième projet politique utopique qui échouera aussi lamentablement que les précédents. Mais pour abolir l’esclavage technologique, mettre un terme au règne mortifère de la machine et rendre à l’humanité sa dignité.

La popularité montante des idées de Theodore Kaczynski

  Theodore John Kaczynski alias Unabomber, mathématicien surdoué devenu célèbre pour sa campagne d’attentats par colis piégés qui a sérieusement secoué les États-Unis durant près de deux décennies, est l’auteur de Révolution Anti-Tech : pourquoi et comment ? (2016) récemment traduit aux éditions Libre. L’idée phare défendue dans cet ouvrage est que seul un démantèlement complet du système techo-industriel peut stopper le carnage. Cet article n’a pas vocation à excuser les actes de Theodore Kaczynski ni d’encourager des personnes à l’imiter. L’intérêt est de présenter son diagnostic de la situation et ses propositions pour remédier au bourbier dont nous avons hérité. À aucun moment Theodore Kaczynski n’incite à la violence, il propose plutôt un traité de haute stratégie qui séduira les personnes déterminées à endiguer la catastrophe en cours.

Une lecture indispensable et prioritaire pour tous les résistants.

 Doté d’un QI de 167, entré à l’université d’Harvard à l’âge de 16 ans, Theodore Kaczynski n’a rien d’un fou comme on peut le constater en lisant ses travaux, en visionnant la série Unabomber : Sa vérité diffusée par Netflix[3] ou en se documentant sur son procès[4]. Néanmoins, pour les plus sensibles à la diabolisation des médias, un éminent professeur de psychologie rappelle que « les monstres déshumanisés n’existent que dans notre esprit simplificateur » et qu’ « être immoral n’est jamais équivalent à une absence de moralité[5]. » Aux États-Unis, les idées de Theodore Kaczynski séduisent de plus en plus de personnes aux profils très variés, des anarchistes aux environnementalistes[6] en passant par des conservateurs et des éditorialistes de Fox News[7], ainsi que de nombreux adolescents exprimant leur rejet de la modernité sur TikTok.

« À l'aide des hashtags #tedpill, #tedk et #tedkazcynski – qui collectivement totalisent des millions de vues –, celui qui gobe la Tedpill [“pillule Ted”] publie des photographies de l'Unabomber en “duos” avec d'autres vidéos, créant ainsi un contraste entre les opinions de Kaczynski et les excès présumés de la culture des influenceurs.  

[…]

Avaler la “pilule Ted”, c'est embrasser la romance d'un retour à un mode de vie préindustriel, celui des chasseurs-cueilleurs. C'est rejeter la modernité, l'agriculture et la civilisation
[8]. »

  Si les idées de Theodore Kaczynski touchent un large spectre politique et parlent à tant de monde aux États-Unis (et dans le monde entier), cela mérite d’y jeter un œil. Les gens se laissent séduire par certaines idées parce qu’elles résonnent en eux ; ces idées répondent probablement à leurs préoccupations, attentes et/ou besoins du moment. Qu’y a-t-il de déraisonnable ou d’illogique à souhaiter l’effondrement d’un système qui menace la survie de sa propre espèce ? Cette attitude me paraît tout à fait naturelle, sage et cohérente. C’est ce même instinct de survie qui a permis à Homo sapiens d’essaimer sur tous les continents et de s’adapter à des environnements aux conditions climatiques parfois très rudes. Sans cet instinct, notre espèce se serait éteinte rapidement et ne pourrait afficher aujourd’hui une longévité de 300 000 ans. Pour remettre les choses en perspective, la civilisation industrielle née il y a environ deux siècles représente en durée moins de 0,1 % de l’histoire humaine. Dans ce laps de temps extrêmement court, le système industriel a infligé d’immenses dégâts aux systèmes vivants, à la diversité biologique et à la diversité culturelle.

Oeuvre des machines, la mine d’or à ciel ouvert de Fimiston en Australie, propriété de Northern Star Resources. Un papier nommé A global-scale data set of mining areas paru dans la revue Nature en 2020 cite le chiffre de plus de 35 000 exploitations minières dans le monde.

Un problème de culture et non de nature humaine

 Il y a seulement un siècle, ce monde regorgeait encore de vie : plusieurs millions d’Amérindiens – jusqu’à 18 millions d’individus selon certaines estimations[9] – peuplaient l’Amérique du Nord avant l’invasion européenne et coexistaient avec 30 à 60 millions de bisons[10] (en 1890, il restait 750 bisons[11]) ; au XIXe siècle, toujours en Amérique du Nord, des nuées gigantesques de tourtes voyageuses « obscurcissaient le ciel presque à perte de vue » et en se posant pouvaient « casser les branches des arbres et parfois les renverser » (les descendants des Européens ont exterminé l’espèce en quelques décennies jusqu’à son extinction, probablement au début du XXe siècle[12]) ; en Afrique, où la population humaine s’élevait à environ 140 millions d’habitants en 1820[13], au même moment plus de 20 millions d’éléphants écumaient savanes et forêts (il en reste quelques centaines de milliers aujourd’hui[14]) ; selon le WWF, « il y a seulement 150 ans, les savanes africaines regorgeaient de rhinocéros et d’autres animaux sauvages[15] » ; plus de 85 % des zones humides ont disparu depuis le XVIIIe siècle, le fameux siècle des « Lumières », et plus de 75 % des grands fleuves ont vu leur cours modifié par des infrastructures[16] ; le corail a décliné de moitié en moins de 200 ans[17] ; les herbiers marins ont diminué de 10 % par décennie au cours du XXe siècle[18] ; la biomasse des grands poissons prédateurs a été réduite de près de 70 % en un siècle[19] ; le bétail représente 59 % de la biomasse totale des vertébrés terrestres, les humains 36 % et les vertébrés sauvages (mammifères, oiseaux, reptiles, amphibiens) seulement 5 %[20] ; un million d’espèces végétales et animales sont menacées d’extinction au cours des prochaines décennies, « ce qui n’a jamais eu lieu auparavant dans l’histoire de l’humanité[21] ».

 Si de nombreuses cultures humaines coexistent avec espèces animales et végétales depuis des temps reculés, si aujourd’hui 80 % de la biodiversité mondiale restante se trouve sur des terres « possédées, occupées ou utilisées[22] » par des peuples premiers, le problème n’est pas à chercher dans la nature humaine, mais dans les différents types de sociétés que les humains établissent. D’ailleurs, la diversité culturelle disparaît conjointement à la diversité biologique, et 90 % des langues se seront éteintes d’ici la fin de ce siècle[23]. Depuis les premières cités-États et leur agriculture, les civilisations ont systématiquement ravagé les forêts, ce qui a eu pour résultat de diviser par deux la biomasse végétale sur Terre et de réduire de plus de 20 % sa diversité en 11 000 ans[24].

  « De la Judée à Tunis, au Maroc, et d'autre part d'Athènes à Gênes, toutes ces cimes chauves qui regardent d'en haut la Méditerranée ont perdu leur couronne de culture, de forêts. Et reviendra-t-elle ? Jamais. Si les antiques dieux, les races actives et fortes, sous qui fleurissaient ces rivages, sortaient aujourd'hui du tombeau, ils diraient: “Tristes peuples du Livre, de grammaire et de mots, de subtilités vaines, qu'avez-vous fait de la Nature[25] ?” »

– Jules Michelet, La Bible de I'Humanité, 1864.

 Les peuples non étatiques sont tout à fait capables d’endommager leur environnement (et le font parfois), mais c’est sans commune mesure avec les déserts stériles laissés dans leur sillage par d’anciennes civilisations. La première révolution industrielle et la puissance des machines motorisées ont amplifié de façon prodigieuse le pouvoir de nuisance de la civilisation. De plus, l’exploitation du charbon a probablement sauvé la civilisation occidentale d’un effondrement en raison de la raréfaction aux XVe et XVIe siècles du carburant principal qui alimentait villes et industries : le bois[26].

 La suite, on la connaît.

Contrôler le développement d’une société est impossible

 Pour revenir à Theodore Kaczynski, celui-ci précise dans l’introduction :

  « L’ensemble de ce travail – la partie publiée ici ainsi que ce qui n’existe actuellement que sous forme d’ébauches – va bien au-delà de mes travaux précédents, La Société industrielle et son avenir et L’Esclavage technologique, et représente à peu près le résultat final d’une vie de réflexion et de lecture – intensifiée au cours des trente-cinq dernières années. »

 On veut bien le croire étant donné le nombre impressionnant de références citées au cours du texte. L’ouvrage est décomposé en quatre chapitres, et je m’attarderai ici sur le premier.

 Sur la base de nombreux exemples historiques, Kaczynski soutient l’idée qu’il est impossible de contrôler rationnellement l’évolution d’une société.

« Dans des contextes spécifiques où les données empiriques abondent, il est possible de formuler des prédictions assez fiables à court terme et de contrôler, de manière relativement efficace, le comportement d’une société. Les économistes, par exemple, savent prévoir les conséquences immédiates d'une hausse ou d’une chute des taux d’intérêt sur la société industrielle moderne. Ainsi parviennent-ils à manipuler des variables telles que les niveaux d’inflation et de chômage. Les conséquences indirectes sont plus difficiles à anticiper, et la prévision des effets de manœuvres financières complexes s’apparente plutôt à de la spéculation. C’est pourquoi les politiques économiques du gouvernement des États-Unis sont sujettes à controverses : nul n’est jamais certain de leurs conséquences réelles.

En dehors de ces contextes où les éléments empiriques abondent, ou bien lorsque des effets à plus long terme sont en jeu, les prédictions vérifiées – et ainsi la gestion fructueuse du développement d’une société – sont bien plus rares. En réalité, l’échec est la norme.  

[…]

Des raisons très simples peuvent expliquer l’incapacité manifeste des humains à contrôler le développement de leurs sociétés. Afin d’accomplir une telle performance, il faudrait être capable de prévoir la moindre réaction de la société face à n’importe quelle action susceptible d’être entreprise ; or, de telles prévisions se sont généralement révélées très peu fiables. Les sociétés humaines étant des systèmes complexes – et tout particulièrement les sociétés technologiquement avancées –, la prédiction de leurs réactions ne dépend en fait ni de l’état de leurs connaissances ni de leur niveau de développement technologique. »

 Cette incapacité à contrôler le développement d’une société s’accroît avec la complexité. Ceci explique entre autres pourquoi les sociétés complexes – les civilisations – affichent une espérance de vie moyenne ridicule de 336 ans[27] en comparaison d’innombrables autres cultures qui se maintiennent depuis plusieurs millénaires (BaYaka, San, Hadza, Maasaï, Aborigènes d’Australie, etc.). Mais cela ne veut pas dire pour autant que les sociétés non étatiques multimillénaires contrôlent leur développement. Plus une société gagne en complexité – population en forte croissance, émergence des villes et de l’État, développement de la bureaucratie, technologies modernes, système marchand remplaçant les systèmes traditionnels pour la répartition des ressources – et plus le risque d’effondrement augmente. Le progrès technique pourrait cependant venir à la rescousse du Léviathan en perdition.

  « Des études sur le développement urbain menées par Luis Bettencourt du Laboratoire national de Los Alamos, au Nouveau-Mexique, viennent à l’appui de cette thèse [des rendements décroissants de l’innovation]. Les travaux de son équipe de recherche suggèrent qu’un taux d’innovation toujours plus élevé est nécessaire pour maintenir la croissance des villes et prévenir la stagnation ou l’effondrement, et à long terme cela ne peut pas être soutenable[28]. »

 La puissance phénoménale de l’intelligence artificielle – plus particulièrement avec le développement d’une Intelligence Artificielle Générale (IAG) ou IA forte – pourrait considérablement augmenter ce taux d’innovation, et selon toute logique retarder l’effondrement de la civilisation industrielle. On ne peut pas exclure un tel scénario, d’autant que les spécialistes mondiaux de l’IA tels Jürgen Schmidhuber ou Ilya Sutskever semblent très confiants dans l’avènement de « cette nouvelle forme de vie qui va nous rendre obsolètes[29]. » Mais d’après Kaczynski, inutile d’en arriver là, il suffirait à l’IA de surpasser les humains seulement dans certains domaines techniques précis pour que le travail des muscles et du cerveau soit rendu définitivement inutile au maintien et à l’expansion du système technologique. Qu’adviendra-t-il des humains dans ce scénario ? Nul ne le sait.

La duée de vie moyenne des anciennes civilisations s’élève à 336 ans. La grande puissance technologique de la civilisation industrielle pourrait potentiellement retarder son effondrement, ce qui serait un désastre pour la race humaine et la biosphère.

 Kaczynski cite ensuite un passage d’une tribune publiée en 2000 dans le magazine Wired par Bill Joy, cofondateur et ancien directeur scientifique de la firme informatique Sun Microsystems, qui s’inquiète des conséquences potentiellement cataclysmiques du développement de technologies extraordinairement puissantes, en particulier les nanotechnologies.

  « Les conséquences inattendues [sont] un problème bien connu en matière de conception et d’utilisation de la technologie […]. La cause de nombreuses [répercussions inattendues] semble claire : les systèmes concernés sont complexes, ils impliquent l’interaction et le retour d’information entre de nombreuses parties. Ainsi, tout changement apporté à un tel système se répercutera en cascade de manière difficilement prévisible ; plus encore lorsque des actions humaines entrent en compte. »

 Plus loin dans le même article, il écrit :

  « L’obtention du grand pouvoir des nanotechnologies est un marché faustien qui nous fait courir un grand risque – celui de détruire la biosphère supportant la vie[30]. »

 Il est loin d’être le seul à partager ce constat[31].

 Avec l’augmentation des inégalités, du chômage, de la pauvreté, et de la colère qui en résulte, les tensions atteignent des sommets au sein de la société industrielle. L’instabilité s’accroît, et en réponse les gens se tournent vers des leaders autoritaires qui prétendent avoir la capacité de rétablir l’ordre, la prospérité et l’honneur. Ce qui était vrai au XXe siècle l’est tout autant au XXIe. Mais le pouvoir des grands empereurs antiques, des monarques absolus à partir du XVe siècle et des dictateurs du XXe siècle fantasmé dans l’imaginaire collectif est en réalité beaucoup plus limité qu’on ne le croit.

  « Les dictateurs révolutionnaires du XXe siècle, tels Hitler et Staline, étaient sans doute plus puissants que les monarques “absolus” classiques, étant donné que le caractère révolutionnaire de leurs régimes fit disparaître nombre des structures sociales traditionnelles – formelles ou informelles – et des contraintes coutumières limitant l’exercice “légitime” du pouvoir par les monarques. Mais même le pouvoir des dictateurs révolutionnaires, en pratique, était loin d’être absolu. »

 Sous Staline, l’Union soviétique « était incapable de réguler sa propre main d’œuvre », par exemple pour empêcher la circulation intempestive des travailleurs qui changeaient d’emploi à un rythme élevé. La « Grande Terreur[32] » des années 1937 et 1938 qui, avec un million et demi de personnes arrêtées et 750 000 d’entre elles exécutées, fut « le plus grand massacre d’État jamais perpétré en Europe en temps de paix », n’a rien d’un processus parfaitement planifié et orchestré de main de maître par Staline. Il en a certes été l’instigateur, mais « il s’agit d’un processus précipitamment déclenché par un dictateur effrayé, qui en perdit rapidement le contrôle. » Preuve de l’inconséquence de la Terreur, elle a conduit à l’élimination de « presque tous les officiers formés et expérimentés des rangs supérieurs de l’armée et de la marine soviétiques. » Affaibli par la Terreur, l’appareil militaire soviétique n’a pu résister à l’assaut des forces allemandes en 1941.

 Kaczynski fait une analyse comparable pour le régime nazi. Durant les années 1930, s’opposant à l’effort de guerre et au réarmement, la classe ouvrière allemande empêcha la réduction de la production de biens de consommation exigée par le régime (la fabrication des produits du quotidien freinait la production d’armes). En 1936, dans la région de Münster, une résistance populaire força « les nazis à remettre en place les crucifix qu’ils avaient ôtés des bâtiments scolaires. » De plus, nombre de généraux de la Wehrmacht sentaient probablement que les plans délirants d’Hitler allaient mener l’Allemagne à la ruine, et certains d’entre eux sont allés jusqu’à tenter de l’assassiner, notamment par l’organisation d’un attentat spectaculaire le 20 juillet 1944. À maintes reprises, entre 1938 et 1944, on tenta d’assassiner le Führer. Ce dernier aurait eu une « chance insolente » lui permettant d’être « toujours sauvé au dernier moment par quelque circonstance fortuite. »

 Sur l’inaptitude des civilisations à contrôler leur développement, Kaczynski rapporte les propos d’un écrivain et sociologue allemand influent au XXe siècle, Norbert Elias. Ce dernier a écrit que :

  « “Le cours actuel du […] changement historique entendu comme un tout n’est voulu ni planifié par personne.” Mais aussi que : “La civilisation […] marche à l’aveugle et se maintient en mouvement par la dynamique autonome d’un réseau de connexions […].” »

 Plus loin :

  « [C]omment le jeu d’innombrables ambitions et intérêts individuels – qu’ils soient convergents ou qu’ils s’opposent – peut donner naissance à un phénomène que personne n’a explicitement voulu ou programmé, mais qui découle néanmoins des ambitions et actions d’un grand nombre d’individus […]. »

 Considéré comme l’un des plus grands historiens du XXe siècle, Fernand Braudel faisait un constat similaire.

« Les civilisations sont des mentalités collectives

[…]


À chaque époque, une certaine représentation du monde et des choses, une mentalité collective dominante anime, pénètre la masse entière de la société. Cette mentalité qui dicte les attitudes, oriente les choix, enracine les préjugés, incline les mouvements d’une société est éminemment un fait de civilisation. Beaucoup plus encore que des accidents ou des circonstances historiques et sociales d’une époque, elle est le fruit d’héritages lointains, de croyances, de peurs, d’inquiétudes anciennes souvent presque inconscientes, au vrai le fruit d’une immense contamination dont les germes sont perdus dans le passé et transmis à travers des générations et des générations d’hommes. Les réactions d’une société aux événements de l’heure, aux pressions qu’ils exercent sur elle, aux décisions qu’ils exigent d’elle obéissent moins à la logique, ou même à l’intérêt égoïste, qu’à ce commandement informulé, informulable souvent et qui jaillit de l’inconscient collectif.

Ces valeurs fondamentales, ces structures psychologiques sont assurément ce que les civilisations ont de moins communicable les unes à l’égard des autres, ce qui les isole et les distingue le mieux. Et ces mentalités sont également peu sensibles aux atteintes du temps. Elles varient lentement, ne se transforment qu’après de longues incubations, peu conscientes elles aussi
[33]. »

 Kaczynski mentionne dans son texte plusieurs dirigeants politiques et bureaucrates (Franklin D. Roosevelt, Harry S. Truman, Henry Kissinger, etc.) qui ont eux-mêmes avoué ne pas posséder le pouvoir qu’on leur prête habituellement. Henry Kissinger, consultant et diplomate américain très influent au XXe siècle, a affirmé :

  « L’histoire est un récit d’efforts ayant failli, d’aspirations n’ayant pas été satisfaites, de vœux ayant été exaucés, mais ayant abouti à des résultats différents de ceux escomptés. »

De son côté, Harry S. Truman, successeur de Roosevelt à la présidence des États-Unis en 1945, a déclaré :

« Le Président dispose peut-être de grands pouvoirs que lui confie la Constitution, ou en vertu de certaines lois votées par le Congrès des États-Unis ; mais le principal pouvoir du Président est celui de convoquer des gens, et d’essayer de les convaincre de faire ce qu’ils devraient normalement faire sans qu’on ait à les en persuader. Voilà à quoi je passe la plupart de mon temps. Voilà à quoi les pouvoirs du Président se résument. »
Harry S. Truman.

 Même ceux qui gouvernent paraissent tout à fait conscients de leur impuissance quant à donner une direction précise et voulue à l’évolution de la société. Pourquoi donc les politiciens convoitent-ils le trône si l’incapacité d’un gouvernement à contrôler le développement d’une société fait consensus au sein des élites ? Quelle légitimité peut-on encore donner à un gouvernement dans ce cas ? Cela devrait sérieusement nous questionner sur le véritable rôle de l’État et des institutions internationales. Quels sont leurs objectifs réels ? Leur pouvoir sert-il à assurer la sécurité et améliorer le bien-être du peuple à long terme ? Ont-ils réellement les moyens de concrétiser cet objectif ? Le rayon d’action effectif de ce pouvoir ne se limite-t-il pas à la défense des intérêts à court terme des élites au sommet de la hiérarchie ?

« C’est important de comprendre que beaucoup des réductions des inégalités au cours du XXe siècle ont été causées soit par les guerres, soit par des réactions politiques à la suite des guerres qui se sont faites un peu dans l’urgence. La réduction des inégalités n’est pas la conséquence tranquille du processus démocratique parlementaire[34]. »

– Thomas Piketty, économiste français.

 L’historien Walter Scheidel abonde dans le sens de Piketty[35].

 Plus loin dans le premier chapitre, Kaczynski s’en prend aux technophiles persuadés que puissance technique et possibilité de contrôle (pour améliorer la société) suivent une même courbe ascendante. Or leur discours ne repose sur aucune démonstration factuelle sérieuse, mais sur une simple croyance – la technologie serait intrinsèquement bonne (pour les plus ahuris d’entre eux à l’image de Kevin Kelly, le fondateur du magazine Wired) ; ou la technologie serait neutre (pour la plupart des autres). Au cours de ses travaux pour anatomiser la société industrielle, le sociologue et historien Jacques Ellul a démontré que la technologie n’était pas neutre[36].

 Kaczynski poursuit :

« Jusqu’à présent (2013), des personnes dont on aurait espéré mieux continuent d’ignorer le fait que le développement des sociétés ne peut jamais être contrôlé de manière rationnelle. Ainsi voyons-nous souvent des technophiles déclarer des choses aussi absurdes que : “l’humanité contrôle son propre destin” ; “[nous allons] prendre en charge notre propre évolution” ; ou encore, “les gens [vont] s’emparer du processus évolutif”. Les technophiles veulent “orienter la recherche de manière à ce que les nouvelles technologies améliorent la société” ; ils ont créé une “Université de la Singularité” et un “Institut de la Singularité” censés “déterminer les avancées et aider la société à faire face aux ramifications du progrès technologique, et “s’assurer […] que l’intelligence artificielle […] demeure favorable” aux humains.

Bien évidemment, les technophiles ne parviendront ni à “déterminer les avancées” du progrès technique ni à s’assurer qu’elles “améliorent la société” et demeurent favorables aux humains. À plus long terme, les améliorations technologiques seront “déterminées” par des luttes imprévisibles et incontrôlables entre groupes rivaux, qui développeront et utiliseront la technologie à seule fin de maximiser leurs avantages aux dépens de leurs concurrents. »

 Le culte de la technologie conduit irrémédiablement à produire des jugements biaisés sur ces questions. Jacques Ellul écrivait que « l’homme ne peut vivre sans sacré », c’est pourquoi « il reporte son sens du sacré sur cela même qui a détruit tout ce qui en était l’objet : sur la technique[37]. »

 Dans le second chapitre, Kaczynski développe davantage sa théorie fournissant une explication convaincante à l’impossibilité de contrôler rationnellement le développement d’une société. Les « groupes rivaux » qu’ils désignent par le terme de « système autopropagateur » sont « les nations, les entreprises, les syndicats, églises et partis politiques, ainsi que des groupes manquant de délimitations claires et d’organisation formelle (écoles de pensée, réseaux sociaux, sous-cultures). » Ces « systèmes autopropagateurs » luttent entre eux pour accroître continuellement leur pouvoir et leur taille, gage de survie à court terme. C’est la raison pour laquelle les systèmes autopropagateurs ne peuvent se préoccuper de leur survie à long terme et s’engouffrent ainsi dans une spirale suicidaire, entraînant l’ensemble de l’humanité dans l’abîme.

« Les principaux systèmes autopropagateurs humains du monde exploitent chaque opportunité, utilisent chaque ressource et envahissent tous les endroits où ils peuvent trouver quoi que ce soit qui les assiste dans leur incessante quête de pouvoir. Au fur et à mesure du développement hautement technologique, de plus en plus de ressources, qui semblaient autrefois inutiles, s’avèrent ultimement utiles, et de plus en plus de lieux sont envahis, et de plus en plus de conséquences destructrices s’ensuivent.

[…] si le développement du système-monde technologique se poursuit sans entrave jusqu’à sa conclusion logique, selon toute probabilité, de la Terre il ne restera qu’un caillou désolé — une planète sans vie, à l’exception, peut-être, d’organismes parmi les plus simples — certaines bactéries, algues, etc. — capables de survivre dans ces conditions extrêmes. »

 Beaucoup ne comprennent toujours pas la gravité de la situation – ou s’en moquent éperdument, pour diverses raisons. Certains balayent d’un revers de la main l’éventualité d’un suicide de l’humanité par la technologie en considérant la chose comme trop extrême, radicale, voire comique. Récemment, en évoquant les conséquences du changement climatique et « l’apocalypse » planétaire à venir, la journaliste de 27 ans Salomé Saqué a été ridiculisée par plusieurs éditorialistes d’âge mûr qui sont partis en fou rire sur le plateau de l’émission 28 minutes d’Arte[38]. Les journalistes se gaussent parce qu’en réalité l’apocalypse est déjà là, il se nomme civilisation industrielle, et ils en sont parmi les premiers bénéficiaires sur Terre. La seule chose critiquable dans l’intervention de Salomé Saqué est qu’elle ne paraît pas réaliser, comme beaucoup d’autres, que la révolution industrielle constitue l’élément déclencheur de l’intensification vertigineuse du changement climatique. L’accélération du changement climatique est un symptôme, et non la racine du mal. Comme l’énergie fossile a engendré le système techno-industriel, elle est si vitale pour lui que jamais il ne pourra s’en passer. Rappelons que selon le physicien australien Derek Abbott, il faudrait construire au moins 15 000 centrales nucléaires en plus des 445[39] déjà en service pour obtenir une civilisation industrielle fonctionnant à 100 % d’électricité nucléaire[40]. Cela a peu de chances de se produire avant que la crise climatique ne dégénère (et tant mieux). De son côté, l’industrie des renouvelables va poursuivre son développement, ce qui fait dire à Ilya Sutskever, directeur scientifique du laboratoire de recherche OpenAI fondé par Elon Musk, ceci :

  « Il est fort probable que la surface de la Terre soit un jour recouverte de panneaux solaires et de datacenters[41]. »

  Perspective réjouissante, n’est-ce pas ?

L’entreprise Carterpillar propose maintenant à ses clients l’installation d’un système électrique pour réduire la consommation et les émissions du moteur diesel de ses camions miniers. D’autres entreprises développent des camions géants entièrement électriques fonctionnant sur batteries. Bientôt des mines à ciel ouvert à faibles émissions de GES, pour une destruction planétaire « bas carbone » et « durable ».

 Mais Kaczynski n’est pas seulement critique vis-à-vis des technolâtres, il souligne la crédulité de certains penseurs technocritiques réputés, dont Ivan Illich.

« Il y a plusieurs décennies, lors d’une excursion particulièrement confuse au royaume de l’imaginaire, le célèbre critique de la société technologique Ivan Illich écrivit : “Je crois qu’il faut inverser radicalement les institutions industrielles, reconstruire la société de fond en comble.” Il argua qu’il nous faudrait saisir “l’occasion de construire une société conviviale, en continuelle transformation à l’intérieur d’un cadre matériel défini par des proscriptions rationnelles et politiques.” Qu’il était “non seulement nécessaire, mais possible d’instaurer une société conviviale, à condition d’utiliser consciemment une procédure réglée” – comme si l’on pouvait rationnellement “reconstruire”, “construire” ou “instaurer” une société. »

 Il ne s’agit pas ici de jeter à la poubelle l’œuvre critique d’Illich sur la société industrielle, mais plutôt de mettre en évidence les propos utopiques de nombreux intellectuels et scientifiques au moment de proposer des solutions réalistes aux problèmes de leur époque.

 Pour toutes ces raisons, et pour éviter des dégâts irréversibles sur la biosphère aux conséquences funestes pour la race humaine, Kaczynski argue qu’il n’y a aucune autre issue réaliste que de déconstruire le système techno-industriel. Atteindre cet objectif doit nécessairement passer par une révolution contre la technologie. Il explique ensuite plus en détail dans les troisième et quatrième chapitres « comment transformer une société », les « erreurs à éviter » ainsi que les « orientations stratégiques pour un mouvement anti-technologie ». Ces sujets ne seront pas abordés ici.

 La proposition de Theodore Kaczynski peut paraître trop extrême ou radicale au premier abord, mais il faut garder à l’esprit que nous faisons probablement face au plus grand défi de l’histoire. La situation ressemble à bien des égards à la période de l’Occupation durant la Seconde Guerre mondiale ; la tyrannie des machines s’est substituée à celle des nazis. L’esclavage technologique est l’héritage des révolutions scientifique et technique de la Renaissance et des Lumières qui ont désacralisé la nature (humain compris) et sacré le progrès technique. Le système technologique qui en a résulté est une force aveugle, colonisatrice et génocidaire. On parle dans le cas présent d’une possible extinction de l’espèce humaine et de toutes les formes de vie complexes sur Terre. Alors que nous tergiversons à considérer l’ensemble des issues à notre disposition en invoquant des croyances dogmatiques, le système technologique inflige toujours davantage de dégâts à la biosphère. Plus ces dégâts seront importants, moins la Terre pourra supporter d’êtres vivants – humains compris – une fois le système technologique effondré. Refuser l’efficacité en invoquant des rationalisations philosophiques ou morales extravagantes n’est pas une attitude digne et responsable face à la gravité de la situation.

  L’industrie minière fait un lobbying intensif pour aller miner le plancher océanique du Pacifique à la recherche de métaux essentiels aux technologies de rupture et aux technologies dites « vertes ». C’est une énième aberration, car les sédiments marins jouent un rôle essentiel dans la régulation des cycles du carbone et de l’oxygène[42]. La convergence NBIC (Nanotechnologie, Biotechnologie, Informatique et sciences Cognitives), un projet de société « transhumaniste » visant à améliorer les performances des êtres humains et de la nature, est imposée aux États-Unis, en Europe, au Japon ou en Chine par les gouvernements, les institutions internationales et les firmes transnationales sans aucune consultation démocratique[43]. Les scientifiques recherchent avec acharnement des moyens pour produire des carburants de substitution à partir de plantations industrielles de diverses espèces végétales[44]. Entrepreneurs et scientifiques veulent utiliser la géoingénierie pour domestiquer le climat, sans aucune considération pour les réactions en chaîne qu’une telle intervention pourrait provoquer. Ajoutons que les techniques de capture et de stockage du carbone dites à « émissions négatives » sont présentées comme une version adoucie de l’ingénierie climatique[45]. Mais comment l’application de la même logique techniciste mortifère – remplacer des systèmes vivants jugés inefficients par des systèmes artificiels pour combler les besoins croissants de la civilisation technologique – qui nous piège depuis deux siècles dans l’impasse industrielle pourrait-elle se révéler efficace pour nous en libérer ?

L’exploitation minière des grands fonds océaniques, c’est pour demain. Les machines sont prêtes.

 Quand on y réfléchit un peu, stopper et démanteler le système technologique est une entreprise relativement simple sur le plan technique. C’est infiniment moins complexe que d’envoyer des êtres humains sur la Lune et des robots sur Mars ; rien à voir non plus avec la conception d’une centrale nucléaire, d’un téléphone portable, d’un ordinateur ou même d’une automobile. Ce qui manque, c’est la volonté, l’envie de résister et de se battre pour une cause juste et noble. Quoi de plus stimulant, en cette époque où le système techno-industriel nous condamne à des bullshit jobs plus dégradants les uns que les autres, que d’embrasser l’idéal révolutionnaire d’un monde libéré de l’étreinte des machines ?

 Ernesto Che Guevara, qui a employé la bonne méthode – la révolution – au service d’un mauvais objectif – instaurer le socialisme à Cuba –, a écrit :

  « Le vrai révolutionnaire est guidé par un grand sentiment d’amour. Il est impossible d’imaginer un authentique révolutionnaire sans cette qualité[46]. »

 Aimez-vous la vie ? Aimez-vous ce monde, ses forêts et ses océans, ses lacs et ses rivières, ses prairies et ses montagnes ? Aimez-vous leurs habitants ? Si vous répondez par la positive, alors vous devriez lire Révolution Anti-Tech, car le système technologique détruira tout. Je laisse à Theodore Kaczynski le mot de la fin avec d’autres citations tirées de son livre.

  « Celui qui pense que le système technologique s’arrêtera un jour de consumer des énergies fossiles rêve éveillé. Que le système renonce ou non à de telles ressources, d’autres énergies destructrices seront utilisées. Les centrales nucléaires génèrent des déchets radioactifs ; aucune solution saine pour s’en débarrasser n’a encore été découverte, et les systèmes autopropagateurs dominants ne s’efforcent même pas de trouver un lieu de stockage permanent pour ces déchets s’accumulant.

Comme nous l’avons souligné, la sélection naturelle favorise les systèmes autopropagateurs priorisant le pouvoir immédiat, sans considération pour les conséquences à long terme. Des centrales nucléaires continuent donc d’être construites, tandis que la gestion des déchets demeure un problème négligé. En réalité, cette question des déchets est en passe de devenir totalement ingérable car, en sus des quelques grands réacteurs à l’ancienne, nombre de petits réacteurs seront bientôt construits afin que chaque petite ville dispose de sa propre centrale. Les grands réacteurs assuraient au moins la concentration des déchets radioactifs sur quelques sites, tandis que les nouvelles mini-centrales les éparpilleront absolument partout. Il faut être terriblement naïf pour croire que chaque petit bourg traitera ses propres déchets de manière responsable. En pratique, la plupart des matières radioactives s’échapperont dans la nature.

Les énergies dites “vertes” ne sèvreront pas le système de sa dépendance aux combustibles fossiles et à la puissance nucléaire. Et même si elles y parvenaient, ces sources d’énergie n’ont, à l’examen, rien de très vert. »
  « Ceux d’entre nous qui considèrent le système technologique comme un mal sont souvent tentés de s’attaquer aux maux secondaires qui lui sont associés. […] Il faut savoir résister à cette tentation. […] Une tentative d’éliminer le capitalisme, la mondialisation, la centralisation ou tout autre mal secondaire ne peut que détourner l’attention de la nécessité d’éliminer l’entièreté du système technologique. »
  « Vous devez prendre une décision : l’élimination du système technologique justifie-t-elle tous les risques désespérés et les désastres terrifiants qu’elle implique potentiellement ? Si vous n’avez pas le courage de répondre “oui” à cette question, alors vous devriez cesser de vous plaindre des maux et des difficultés du monde moderne, et simplement vous y adapter au mieux, car seul l’effondrement du système pourrait mettre un terme à l’inexorable catastrophe en cours. »
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Footnote [1] — https://www.lesechos.fr/2016/02/la-guerre-mondiale-du-sable-est-declaree-1110253

Footnote [2] — https://www.resourcepanel.org/fr/rapports/perspectives-des-ressources-mondiales

Footnote [3] — https://www.netflix.com/fr/title/81002216

Footnote [4] — https://www.partage-le.com/2021/08/16/sur-theodore-kaczynski-et-sa-pretendue-folie-par-nicolas-casaux/

Footnote [5] — Philippe Rochat, Moral Acrobatics : How We Avoid Ethical Ambiguity by thinking in Black and White (2021).

Footnote [6] — https://nymag.com/intelligencer/2018/12/the-unabomber-ted-kaczynski-new-generation-of-acolytes.html

Footnote [7] — https://www.foxnews.com/opinion/was-the-unabomber-correct

Footnote [8] — https://thebaffler.com/latest/influencer-society-and-its-future-semley-millar

Footnote [9] — https://www.britannica.com/topic/Native-American/Native-American-history

Footnote [10] — https://www.thecanadianencyclopedia.ca/en/article/bison

Footnote [11] — https://www.newscientist.com/article/mg22129500-100-buffalo-stance-broadside-of-an-american-icon/

Footnote [12] — https://blog.history.in.gov/flocks-that-darken-the-heavens-the-passenger-pigeon-in-indiana/

Footnote [13] — http://www.manning.pitt.edu/pdf/2014.AfricanPop-Akyeampong.pdf

Footnote [14] — https://peerj.com/articles/2354/

Footnote [15] — https://wwf.panda.org/wwf_news/?62800/Factsheet-African-Rhinoceros

Footnote [16] — https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fcosc.2020.615419/full

Footnote [17] — Ibid.

Footnote [18] — Ibid.

Footnote [19] — Ibid.

Footnote [20] — Ibid.

Footnote [21] — https://www.ipbes.net/news/Media-Release-Global-Assessment-Fr

Footnote [22] — https://www.worldbank.org/en/topic/indigenouspeoples#1

Footnote [23] — https://www.cambridge.org/core/journals/evolutionary-human-sciences/article/cultural-extinction-in-evolutionary-perspective/035F093515E2A445FCA0D78DA542075B

Footnote [24] — Ibid.

Footnote [25] — Cité par Robert Pogue Harrison dans Forests – The Shadow of Civilization, 1992.

Footnote [26] — https://nature.berkeley.edu/er100/readings/Nef_1977.pdf

Footnote [27] — https://www.bbc.com/future/article/20190218-are-we-on-the-road-to-civilisation-collapse

Footnote [28] — https://reporterre.net/La-faille-de-notre-civilisation-Sa

Footnote [29] — iHuman –  L’intelligence artificielle et nous, documentaire diffusé par Arte en 2020.

Footnote [30] — https://www.wired.com/2000/04/joy-2/

Footnote [31] — https://www.science.org/content/article/could-science-destroy-world-these-scholars-want-save-us-modern-day-frankenstein

Footnote [32] — https://laviedesidees.fr/La-Grande-Terreur-en-URSS-1937.html

Footnote [33] — Fernand Braudel, Grammaire des civilisations, 1963.

Footnote [34] — Thomas Piketty, interviewé dans le documentaire Capitalisme – Une chance ou une malédiction, 2011.

Footnote [35] — https://www.theatlantic.com/business/archive/2017/02/scheidel-great-leveler-inequality-violence/517164/

Footnote [36] — https://www.partage-le.com/2021/11/07/reflexions-sur-lambivalence-du-progres-technique-par-jacques-ellul/

Footnote [37] — Jacques Ellul, La Technique ou l’Enjeu du siècle, 1954.

Footnote [38] — https://youtu.be/lmOORXEo7NQ

Footnote [39] — https://world-nuclear.org/information-library/current-and-future-generation/nuclear-power-in-the-world-today.aspx

Footnote [40] — https://ieeexplore.ieee.org/stamp/stamp.jsp?arnumber=6021978

Footnote [41] — Ibid.

Footnote [42] — « Le plancher océanique, surtout celui des abysses qui représente une immense surface, est le moteur principal du cycle mondial du carbone. C’est lui qui équilibre notre climat à une échelle temporelle d’environ 100 000 ans. À cela s’ajoute un 2ème cycle que l’exploitation des nodules [polymétalliques] risque également de perturber, qui est celui de l’oxygène. Les sédiments marins régulent le taux d’oxygène, et là, il s’agit d’un cycle sur plus de deux millions d’années. », Matthias Haeckel, chercheur au centre GEOMAR Helmholtz pour la recherche océanique, interview parue dans le documentaire La ruée vers les fonds marins du Pacifique.

Footnote [43] — Hélène Tordjman, La croissance verte contre la nature – Critique de l’écologie marchande, 2021.

Footnote [44] — https://greenwashingeconomy.com/au-nom-de-ecologie-enfer-sur-terre/

Footnote [45] — https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/rechauffement-climatique-geoingenierie-climatique-bonne-mauvaise-idee-decryptage-experts-84404/

Footnote [46] — Ernesto Che Guevara, Le socialisme et l’homme à Cuba, 1965.

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